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Le centre Joë Bousquet

29 février 2012

Quelques liens avec des amis du Centre Joë Bousquet

Les amis du centre Joë Bousquet sont très actifs sur la toile. Voici quelques liens qui nous conduiront vers de belles découvertes.

Alain Freixe tient la chronique poésie du quotidien communiste L'Humanité. Il vient d'en consacrer une au livre qu'ont réalisé ensemble le poète Serge Pey et le peintre Joan Jorda, auquel le centre Joë Bousquet a consacré une grande exposition à la Maison Bousquet et plusieurs autres en différents lieux du département (Montolieu, Castelnaudary etc...) Le livre de Serge Pey et Joan Jorda s'intitule "Les poupées de Rivesaltes", en référence au camp de Rivesaltes qui accueillit des réfugiés espagnols au moment de la Retirada. La chronique d'Alain Freixe à lire ici : http://www.humanite.fr/culture/la-revolte-permanente-de-deux-catalans-490724

slacikavrilAnne Slacik expose au musée de Melun. "L'avril, peintures 2010-2011" est le titre de cette nouvelle exposition d'Anne qui pourra se visiter jusqu'au 26 août. Concerts, lectures et ateliers sont proposés au public. A noter, la projection (le samedi et le dimanche à 15 h) d'un film documentaire en lien avec l'exposition et le travail d'Anne. Intitulé "Si vous êtes des mots... parlez. Rencontre avec André du Bouchet" il a été réalisé par Mickael Jacob. Un catalogue accompagne l'exposition : "Anne Slacik, Mallarmé / L'avril peintures 2010-2011", IAC éditions d'Art, en coédition avec le musée Stéphane Mallarmé. Texte de Vincent Gille. 79 pages, 48 illustrations en couleurs. 18 euros. Toutes les infos sur la page personnelle d'Anne : http://anne.slacik.pagesperso-orange.fr/

Alain Paire, après avoir consacré un article très documenté à Max Ernst, s'intéresse à présent à Hans Bellmer, toujours dans l'environnement du camp des Milles, situé entre Aix-en-Provence et Marseille. Max Ernst, Hans Bellmer, faut-il le rappeler, furent deux peintres très liés à Joë Bousquet. L'article est à lire ici, sur le site de la galerie d'Alain : http://www.galerie-alain-paire.com/index.php?option=com_content&view=article&id=158:hans-bellmer-et-les-inconnus-du-camp-des-milles-les-decouvertes-des-philatelistes-aixois&catid=1:exposition-actuellement&Itemid=2

 

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28 février 2012

Un itinéraire poétique autour des éditions de Rivières

rivières1Au mois de mars et dans le cadre de la manifestation nationale Le Printemps des Poètes, le Centre Joë Bousquet vous propose un itinéraire de lectures poétiques en partenariat avec Cépages d'Encres. Ces lectures se dérouleront dans trois lieux différents du département, à Montolieu, Port-La-Nouvelle et Carcassonne. En route...

Samedi 3 mars à 17 h au musée des arts et métiers du livre de Montolieu

Textes de Joë Bousquet, Charles-Pierre Bru, Jean Lebrau et Paul Pugnaud lus par Cépages d'Encres.

Dans le cadre de l'exposition « Itinéraire poétique » (jusqu'au 1er avril) qui présente un cheminement poétique autour de François-Paul Alibert, Joë Bousquet, Paul Eluard, Claude-Louis Estève, Jean Lebrau, Michel Maurette, René Nelli,Pierre Reverdy, Paul Pugnaud dont les poésies sont accompagnées d’oeuvres d'André Blondel, Charles-Pierre BRU, Denise Bellon, Max Ernst…

Vendredi 9 mars à 18 h à la médiathèque municipale de Port-La-Nouvelle

Les poètes des éditions de Rivières lus par Cépages d’Encres.

Dans le cadre de l'exposition « Les éditions de Rivières ou l’après Pierre André Benoit » (jusqu'au 31 mars). L’exposition présente sous vitrine une sélection de livres des éditions de Rivières, réunissant poètes et peintres. Sur les murs, les oeuvres de Pierre-André Benoit, Claude Clarbous, Didier Equer, Sylvère.

Samedi 17 mars à 17 h à la Maison Bousquet de Carcassonne

Les poètes des éditions de Rivières lus par Cépages d’Encres.

Dans le cadre de l'exposition « Les éditions de Rivières, hommage à Pierre André Benoit » (jusqu'au 17 mars). Oeuvres exposées : 250 livres uniques ; 45 oeuvres de peintres et photographes ; 20 peintures, collages et gouaches de Pierre André Benoit ; installations de Claude Clarbous, peintures d'Anne Slacik, Claude Viallat...

12 février 2012

Exposition des éditions de Rivières : entretien avec Jean-Paul Martin

"Mon expérience m'a conduit à admettre comme une évidence que poésie et peinture sont indissociables" 

rivières2Le Centre Joë Bousquet présente jusqu'au 17 mars, à la Maison Bousquet, une exposition consacrée aux éditions de Rivières. Cousin de Pierre-André Benoît et créateur de ces éditions qui réalisent exclusivement des livres d'artistes à très petits tirages, Jean-Paul Martin nous a accordé un entretien. Où l'éditeur raconte son extraordinaire itinéraire dans la compagnie de peintres et poètes d'aujourd'hui.  

Comment sont nées les éditions de Rivières ?

En 2003, lors du dixième anniversaire de la mort de Pierre-André Benoît - PAB est décédé en janvier 1993 - un hommage lui a été rendu au musée d'Alès qui porte son nom. Je disposais, dans les archives de PAB qui m'étaient revenues, d'une multitude de poèmes. Pour des raisons très personnelles et familiales, j'ai alors décidé de faire un livre avec certains de ces textes. Un livre pour moi seul et mon entourage, qui n'était pas du tout destiné à être diffusé. Mais je ne voulais pas de ces poèmes sur des feuilles volantes. J'ai donc réalisé une mise en page, aussi simple que possible, et ainsi était le livre. C'est sous cette forme qu'Anne Slacik l'a vu. Elle a tout de suite manifesté le désir de l'illustrer. Ce qui a été fait. Voilà comment sont nées les éditions de Rivières. A l'origine, c'était du bricolage...

Anne Slacik est la première artiste peintre du catalogue des Rivières. D'autres sont ensuite arrivés très vite...

Anne, en effet, fut la première. Sylvère est venu tout de suite après, et ainsi de suite. Puis, un premier poète s'est mêlé au jeu. Il s'agit de Michel Butor, qui a travaillé avec Anne Slacik. Ce fut la première infidélité des Rivières aux textes de PAB que j'ai quand même continué à publier. De son vivant, Pierre-André Benoît était reconnu, dans les milieux artistiques, comme typographe et éditeur, créateur de livres dirons-nous. Mais son rêve aurait été d'être reconnu comme poète. C'est pourquoi il est important que les Rivières continuent à publier ses textes. Car désormais, PAB est reconnu comme tel, lui qui aura finalement été le poète du XXe siècle le plus illustré par ses contemporains : Braque, Picasso etc... Les éditions de Rivières se situent dans la continuité de la trajectoire de Pierre-André Benoît. Les poètes d'aujourd'hui sont illustrés par leurs contemporains. Ces créateurs travaillent dans l'après-PAB, éclairés par l'œuvre de PAB et de ses amis peintres.

Entrons, si vous le voulez bien, dans « l'arrière-cuisine » des éditions. Comment se conçoit un livre des éditions de Rivières ?

Je fonctionne par amitié et affinités. Les circonstances font que j'accepte des projets de livres qui ne sont pas forcément les miens. Ces projets sont souvent le fruit d'une rencontre. Je mets un peintre en présence d'un poète et le travail se réalise. Quand je reçois par exemple des textes de poètes, je cherche auprès de quel peintre ces textes pourraient avoir une résonance et je fais mes propositions. Je travaille à partir d'une connaissance personnelle des artistes et de leurs œuvres. Je peux me tromper, mais si c'est le cas, les peintres n'osent pas me le dire. Ils font, malgré tout. Ils prennent ma proposition comme une contrainte, un défi ! Ce qui est important pour la réussite du livre, c'est la confrontation. Car dans une rencontre, il y a ce que l'on croit deviner, mais aussi le silence, le non-dit sur quoi le livre prend forme. Mon expérience m'a conduit à admettre comme une évidence que poésie et peinture sont indissociables. On met des mots sur des images ou des images sur des mots : c'est une histoire sans fin...

Sans fin et sans limite, dirait-on, puisque les Rivières ont déjà réalisé plus de 1 000 livres ! Cette accumulation qui donne le vertige fait partie intégrante de votre projet. Elle lui donne sens. Mais pouvez-nous nous expliquer la raison de cette frénésie de création ? 

Oui, plus de 1 000 titres à ce jour, c'est énorme ! La raison, c'est la maladie dont j'ai été atteint. Elle m'a obligé, pour la vaincre, à penser à autre chose, à faire autre chose que m'occuper exclusivement d'elle. Les livres ont joué le rôle de médicament. C'est la stricte vérité. C'est pourquoi j'aime bien l'idée de livre-médicament. Pour moi, ce n'est pas un concept mais une réalité. Et il m'est arrivé de travailler avec des artistes qui, malades comme moi, se retrouvaient dans le même circuit de difficulté. Chaque fois, j'ai retrouvé la même volonté d'avancer, de faire, de multiplier les réalisations pour sortir de la menace que la maladie fait planer autour d'elle. Puis il y a un autre élément : PAB aimait travailler vite. Avec René Char, il pouvait faire un livre en moins d'une semaine. PAB créait toujours des livres très simples, rapidement réalisables. Les Rivières ont gardé cette spontanéité, cette rapidité d'exécution. Et pour PAB aussi, les livres étaient une forme de compensation. Les livres comblaient un manque. PAB était très entouré par sa famille et ses proches. S'il a pu faire ce qu'il voulait, s'il a joui d'une aussi grande liberté, c'est grâce à sa famille qui l'a soutenu quand il ne gagnait pas d'argent. La solidarité a joué pleinement pour lui. Mais c'est quelqu'un qui vivait dans un grand désert sentimental. Alors, les livres furent aussi, pour lui, une sorte de médicament contre cette solitude sentimentale. Il a cherché à combler un manque affectif dans l'amitié des peintres et des poètes.

Parmi les poètes publiés aux Rivières, Gaston Puel occupe une place importante, avec de nombreux livres. Que pouvez-vous nous dire sur cette complicité ?

C'est vrai, Gaston Puel occupe une place prépondérante au catalogue des Rivières, aux côtés de Michel Butor et de BTN. L'une des raisons est qu'il a été un ami de PAB et que, de ce fait, il appartient à l'histoire de Pierre-André Benoît. Il m'importe donc qu'il joue aujourd'hui son rôle dans l'après PAB. Et puis, je ne suis pas un papillon : j'aime bien faire le tour d'une question, creuser, approfondir une relation, de sorte que, mis bout à bout, les livres réalisés soient significatifs. Avec Gaston Puel, la complicité s'est construite sur la base d'un travail très intense : 65 livres aujourd'hui au catalogue. Il était intéressant de confronter le poète Gaston Puel à des peintres de la nouvelle génération. Il a joué le jeu. L'aventure continue.

Il est un lieu vital dans la vie des éditions, c'est la maison de Pierre-André Benoît à Rivières, près d'Alès. C'est l'épicentre de votre géographie éditoriale ?

La maison de Rivières a joué un rôle important dans la vie de PAB. Il l'avait achetée en 1971, après la mort de sa mère. Peu de temps après, il y eut l'exposition au musée Fabre de Montpellier qui contribua à faire connaître son travail éditorial. Alors PAB a commencé à bien vendre ses livres et il a pu restaurer la maison où il s'est installé pour travailler. Aujourd'hui, il n'y a plus rien de cette époque, PAB ayant tout donné, avant sa mort, au musée d'Alès et à la Bibliothèque Nationale. Mais je ne sais pas pourquoi, j'ai décidé de conserver ce lieu quand j'en ai hérité. Et aujourd'hui, il est devenu le lieu des rencontres entre peintres et poètes que nous recevons lorsque nous nous y installons, l'été. C'est à Rivières, lors de ces rencontres, que se forment la plupart des projets de livres. Le lieu est donc central dans le processus de création.

Nous avons réalisé cet entretien dans le prolongement de l'exposition présentée en ce moment à la Maison Joë Bousquet de Carcassonne. En quoi cette exposition est importante pour vous ?

Je dirais que c'est l'exposition rêvée et... aimée. Je ne dis pas que les nombreuses expositions qui ont déjà eu lieu autour des Rivières n'ont pas été importantes. Mais celle-ci occupe une place particulière. Elle est d'abord le résultat d'une demande de cœur, formulée par le directeur du Centre Joë Bousquet, René Piniès. Nous nous connaissions car il s'intéressait au travail de PAB. Puis quand il a découvert les éditions de Rivières, pour lui, c'était évident : ce travail méritait une grande exposition. Nous avions fait un premier pas avec l'exposition au musée du livre et des arts graphiques de Montolieu. Avec la Maison Bousquet, un lieu plus vaste qui permet de montrer davantage de livres, nous avons franchi un cap supplémentaire. Il faut ajouter que Pierre André-Benoît avait connu la Maison Bousquet car il était venu rendre visite au poète dans sa chambre du 53 rue de Verdun à Carcassonne. Donc, cette exposition était comme une évidence. Fruit d'une amitié et en complète harmonie avec l'histoire personnelle de PAB, cette exposition devait s'inscrire dans l'histoire des éditions de Rivières.

Recueilli par Serge Bonnery

L'exposition est ouverte à la visite du mardi au samedi de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h jusqu'au 17 mars. Entrée libre et gratuite. Une visite guidée, conduite par René Piniès, directeur du Centre Joë Bousquet et concepteur de l'exposition, aura lieu le samedi 25 février à 16 h 30 (entrée gratuite). Une lecture de poèmes aura lieu le samedi 17 mars à 16 h 30, jour de clôture de l'exposition (entrée gratuite). 

7 février 2012

Max Ernst au Camp des Milles

Max Ernst fut LE peintre de Joë Bousquet, les deux hommes furent liés par des liens d'amitié indéfectiblse qui ne se sont pas démentis lors de l'internement de Max Ernst au Camp des Milles, près d'Aix-en-Provence. Pendant cette noire période, Bousquet soutint financièrement son ami en lui envoyant de l'argent en échange de toiles. Bousquet  a possé jusqu'à trente oeuvres de Max Ernst dans sa collection personnelle. 

Alain Paire, ami du centre Joë Bousquet et qui tient galerie à Aix-en-Provence, consacre à l'emprisonnement de Max Ernst au Camp des Milles un passionnant article sur son site internet. Où il est question de Joë Bousquet. 

tanning3

Signalons, dans le même temps, la disparition de Dorothea Tanning décédée le 31 janvier à l'âge de 101 ans. Née en 1910 dans l'Illinois, aux Etats-Unis d'Amérique, Dorothea Tanning intègre en 1942 le groupe surréaliste à la faveur d'une exposition - elle est peintre - à laquelle Marx Ernst l'invite à participer. C'est le début de leur grande histoire d'amour. Ils se marieront quelques années plus tard en Californie avant de s'installer à Paris puis en Provence. Les deux artistes ont travaillé main dans la main, unis par une immense complicité, jusqu'à la disparition de Max Ernst en 1976. 

Pour en savoir plus sur Dorothea Tanning (ici en photo avec Marx Ernst), un site internet lui est entièrement dédié... en anglais !

3 février 2012

Hommage à Bernard Vargaftig (2)

Pour prolonger notre hommage au poète Bernard Vargaftig qui vient de nous quitter, nous publions ci-dessous le texte écrit par Alain Freixe et paru dans le journal L'Humanité du jeudi 2 février. 

Ce texte est également disponible sur le blog personnel d'Alain Freixe que nous remercions de nous avoir autorisé à le diffuser sous la bannière du Centre Joë Bousquet. 

L'hommage d'Alain Freixe

vargaftig2La mort, c'était hier, le 27 janvier 2012 à Avignon.

La vie, c'est 1934, la naissance à Nancy puis les terribles années 40, celles des persécutions nazies, années de la peur, de la fuite et du silence. Années de clandestinité où l 'on apprend aussi à tenir, à se tenir.

La vie en poésie, ce sera en 1965, la soirée du Récamier et dans ce théâtre parisien les paroles d'encouragement de Louis Aragon. Après Chez moi partout publié en 1967 chez PJ Oswald se succèderont une trentaine de livres plus des livres d'artiste avec Olivier Debré, Colette Deblé, Germain Roesz...ainsi que deux remarquables anthologies ; l'une La poésie des romantiques chez Librio, l'autre Poésie de résistance chez J'ai lu. Je ne dirai rien des prix qu'il put recevoir chemin faisant, celui de l'académie Mallarmé en 1991, celui Jean Arp en 2008, je préfère évoquer ici ses deux derniers ouvrages en souhaitant qu'ils donnent envie de retrouver ceux qui se tiennent à l'arrière et notamment cette Suite Fenosa, avec Bernard Noël, publiée chez André Dimanche en 1987.

Le premier est un coffret original liant image et texte, Coffret livre « L'aveu même d'être là » et DVD « Dans les jardins de mon père », les deux constituants comme une autobiographie poétique de Bernard Vargaftig. Le poète a choisi lui-même les poèmes de son anthologie. Revisitant son œuvre, c'est sa vie qu'il reparcourt. Se promenant dans ses poèmes, il s'arrête  ici ou là, comme dans ses souvenirs d'enfant juif caché en Haute-Vienne, près d'Oradour, pendant l'occupation nazie. Ce voyage dans la mémoire n'est pas un simple retour en arrière mais une véritable marche en avant, un véritable travail, une manière de creuser, de pousser plus avant la vie et ce souffle intérieur qui la porte. Cela qui a besoin de toujours plus de mots pour dire  ce simple fait stupéfiant « d'être là », traversé de tous les désastres comme de toute lumière. Aveu à répéter dans la différence de ce qui n'en finit pas de commencer toujours à nouveau.

A propos du second, il peut être intéressant de se souvenir de ce qu'Aragon, en 1967, lors de la publication de La véraison chez Gallimard, disait : « j'aime ça, ce langage, haché comme la douleur ». En effet, Ce n'est que l'enfance est un livre que la douleur rythme. C'est elle qui espace les poèmes, les strophes - quatre strophes de quatre vers pour chaque poème - qui va jusqu'à inclure « deux pages blanches et muettes » pour « (dire) la mémoire vivante de (son) fils, Didier Vargaftig ». Devenue rythme, c'est elle qui engendre le temps propre à ce livre. Un temps dont la couleur pudique est celle du « déplacement intérieur » d'un « cri nul désert », le blanc d'un mouvement qui dénude, « faille d'enfance » avant « le dévalement », « accomplissement à nu que le manque / ne rattrape pas » et où c'est l'enfance qui appelle depuis cette distance où elle se tient, ce souffle qu'elle sait creuser toujours à l'avant de nos jours. L'enfance en appelle aux mots non pour combler cette déchirure, la taire par la même occasion mais pour la maintenir, au contraire, aussi vive que ces falaises qui tiennent, face aux vagues aveugles qui les dénudent toujours plus comme cet « ailleurs de moi d'un ailleurs / par la crainte dont la répétition se rapproche / où c'est l'accomplissement qui s'ouvre ». 

Aujourd'hui, nous reste son murmure - Il disait : « Je n'écris pas, je marmonne » - sa respiration d'encre, son souffle. C'est là qu'il engagea son être et son existence, son insoumission au monde comme il va charriant toujours plus d'injustice et d'intolérable.

Bernard Vargaftig n'est pas mort. Sa vie s'est accomplie.

@ Alain Freixe

Bernard Vargaftig, Coffret livre « L'aveu même d'être là » et DVD « Dans les jardins de mon père », film de valérie Minetto et Cécile Vargaftig,  Au diable vauvert, La Laune, BP 72, 30600 Vauvert (39 euros)

Bernard Vargaftig, Ce n'est que l'enfance, Prix de littérature Nathan Katz 2008Arfuyen, Lac Noir, 68370 Orbey (11 euros)

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2 février 2012

Hommage à Bernard Vargaftig

vargaftigLe poète Bernard Vargaftig vient de nous quitter. Le Centre Joë Bousquet avait eu l'honneur et le bonheur de l'accueillir lors de rencontres, dans le voisinage de Michel Butor, Bernard Noël et Gaston Puel. Bernard Vargaftig a composé de nombreux livres d'artistes avec des amis peintres. Il a réalisé plusieurs livres avec Anne Slacik. 

Né en 1934 à Nancy, Bernard Vargaftig s'était établi ces dernbières années en Avignon. Il a passé son enfance à fuir les persécutions des nazis contre les juifs. Au début de 1944, il est caché au Collège de Saint-Junien d’où, après le débarquement, sa mère le fera revenir près d’Aixe-sur-Vienne. C’était le 9 juin. Le 10, une colonne de SS mettait le feu à Oradour-sur-Glane massacrant 642 hommes, femmes et enfants. Les souvenirs de ces années difficiles forment la trame de Un même silence (André Dimanche, 2000) et sont évoqués dans Aucun signe particulier (Obsidiane, 2007). 

Il a reçu en 1991 le prix de l'académie Mallarmé. Deux colloques ont été consacrés à son œuvre, à Villeneuve-sur-Yonne en 2001 puis à Cerisy en juillet 2008.

L'itinéraire poétique de Bernard Vargaftig est magnifiquement évoqué dans un volume double composé d'un film DVD, "Dans les jardins de mon père", écrit par sa fille Cécile Vargaftig et réalisé par Valérie Minetto et d'un livre, "L'aveu même d'être là". Le tout publié aux éditions Au Diable Vauvert.

Pour rendre hommage au poète disparu et si cher à nos coeurs, nous publions ici une suite de poèmes de Michael Gluck que nous remercions pour nous avoir confié ce texte initialement paru dans le numéro 89 du Carnet des Lierles de Nicole et Georges Drano.


mouvements d’un paysage

pour Bernard Vargaftig

1.

envol des feuilles

des plumes de paon

le vent tord

le bleu du ciel

 

tombent les fruits du laurier

 

les yeux se posent où

il y eut un figuier

 

la conjugaison du passé se perd

dans le présent du poème

 

2.

tombent l’une après l’autre

les pages blanches d’une rose

sur la paille d’une chaise

 

bouquet sous le linteau

orné d’une tête de mort

fenêtre de la vanité

 

derrière les carreaux

lentement s’est effondré

un pan de montagne

 

3.

soudain c’est comme si

dans l’à-pic s’accrochaient

les tessitures du temps

 

ciel de chaîne

terre de trame

 

rouilles tremblantes

ors délavés

et ce rouge-là des sumacs

 

une vieille voix

de l’abîme à la cime

 

au-dessus

un circaète

 

4.

il a fallu paniers de pierres

et l’une sur deux autres

pour monter ces murets

qui tiennent les terrasses

 

la terre

tremble parfois

tous les efforts s’effondrent

 

ou bien ce sont les morts

qui vont sans laisser traces

ni bras pour la relève

 

il y a des maisons 

qui épousent les pentes

 

5.

au matin la lumière a

poussé les volets

travaillé

dans les fentes du bois

 

la chambre s’éclaire

les nuages

passent sous la voûte

 

au loin la coulée cotonneuse

dévale les pentes vers 

la rivière que l’automne a grossi

 

6.

il suffit de voir de dire

la rose à l’orée du jardin

les grappes de Noah

qui courent sur la rampe

vers la planche inférieure

 

de voir et de nommer la sauge

le gel sur les épines

 

dit-on dit-elle

et pose un caillou une feuille

près du cahier ouvert

 

7.

le vent tourmente 

la moindre racine qui affleure

arrache les couleurs aux pentes

dénude les signes

des travaux et des jours

 

les outils sont rangés

les jardins sommeillent

 

les sommets s’enneigent

 

ciel muet

 

8.

sang n’ai-je vu

dans les derniers rouges

qui écaillent l’abîme

qu’une bête abattue

par la meute des hommes

 

les pluies violentes ravinent

emportent la cendre

des animaux foudroyés

 

le paysage gronde

sous le leurre

de l’immuable

 

9.

le paysage est souffle

dans les pieds talons et orteils

dans les chevilles et genoux

dans les hanches souffle

la colonne vertébrale est souffle

le nuage est poumon

balancement des bras de funambule

souffle dans la pause encore

souffle dans la main 

dans l’appui sur le bâton

et les yeux souffle aussi

le paysage est courant d’air

je suis courant d’air

 

10.

les ipomées tenaces gèlent 

dans le vent malgré la lumière

 

s’accrochent au grillage

calices rétractés

 

plus bas sur la droite

campanile 

de la Madone du Puits

 

un soleil pâle argente l’envers

la chevelure des oliviers

 

11.

travail de l’érosion 

      le temps sculpteur

mais la lumière aussi taille la pierre

fait ymages châteaux en ruines

et le vent répète le râle

des chevaliers gisants

 

la montagne est peuplée

le sang descend les pentes roucoule

sous les pierres des torrents

 

érosion des couleurs aussi

peu à peu le vif est transi

se décompose ou s’envole

 

les arbres se figent

dans la nudité

 

@ Michael Gluck

13 décembre 2011

Un concert-hommage au compositeur Jacques Charpentier

karnatiqueLe concert-hommage que le centre Joë Bousquet organise dimanche 18 décembre à l'auditorium de l'ancienne chapelle des Jésuites (rue des Etudes à Carcassonne) à partir de 15 h ne vient pas de rien. Il se situe d'abord dans le prolongement poétique du vernissage de l'exposition consacrée aux éditions de Rivières présentée à la Maison Bousquet. 

Ce n'est pas la première fois que le centre Joë Bousquet associe la musique et ses langages à ses initiatives. Ceux qui suivent nos activités depuis longtemps se souviennent des moments musicaux offerts par le guitariste Pedro Soler accompagnant la chanteuse Teresa Rebull ou Pedro Soler encore avec son fils Gaspar Klaus à la contrebasse, les textes lus par Gisèle Piera accompagnée au piano, plus récemment Gérard Zuchetto et ses musiciens interprétant des poèmes de Nelli, Bousquet et Reverdy, les troubadours dernièrement en concert de clôture aux rencontres sur le même sujet...

Dimanche, nous vous proposons d'entendre l'oeuvre-vie d'un compositeur hors-norme qui, parallèlement à une brillante carrière dans l'administration artistique - Jacques Charpentier a occupé les hautes fonctions de directeur de la musique, de l'art lyrique et de la danse au ministère de la culture - a écrit un nombre considérable d'oeuvres pour un nombre tout aussi impressionnant d'instruments.

Les Etudes Karnatiques qui seront au programme du concert ont été composées pendant plus de trente ans. Elles ont jalonné les années de travail de Jacques Charpentier qui a importé dans la musique occidentale les modes de la musique traditionnelle de l'Inde, dits modes karnatiques. Ces Etudes pour le piano constituent donc à la fois une fenêtre ouverte sur des modalités d'un langage musical inconnues en Occident et dont la musique occidentale s'enrichit, ainsi qu'un point d'étape important dans l'histoire de la musique pour piano. Avec les Etudes Karnatiques de Jacques Charpentier, l'interprète d'aujourd'hui sait où en est, dans son évolution, la palette sonore du piano au moment où s'achève la composition des oeuvres, au milieu des années 80. Telle est la double originalité de cette contribution qui, au même titre que le Clavier bien tempéré de Bach ou lus tard les études de Chopin, jalonne la littérature pour piano.

Le concert de ce dimanche sera donné par les élèves des classes de piano du Conservatoire à Rayonnement Régional de Perpignan, dirigées par le pianiste François-Michel Rignol. Se joindront trois élèves de la pianiste Christine Tranchant qui enseigne au conservatoire à rayonnement intercommunal de Carcassonne. Une trentaine des 72 études seront jouées sur un piano Yamaha C3. 

Comme vous le lirez dans les notices ci-dessous concernant le compositeur et le pianiste François-Michel Rignol, nous ne seront pas très éloignés de Joë Bousquet et de son univers lors de cette rencontre musicale. En effet, Jacques Charpentier a composé la musique d'un opéra - Béatrice de Planisolles - dont le livret a été écrit par René Nelli. L'oeuvre qui raconte la vie de la parfaite cathare a été créée au festival d'Aix-en-Provence dans les années 70. Jacques Charpentier et René Nelli étaient des amis sûrs. Quand on se rapproche de René Nelli, Joë Bousquet n'est jamais très loin ! Et puis, rappelons que Joë Bousquet fut attiré par les traditions de l'Inde. Il ne fut pas insensible aux propositions philosophiques de Krishnamurti, fut aussi lecteur de Tagore et se sentit toujours proche de René Daumal (auquel il consacra un essai), de Luc Dietrich et de Lanza del Vasto. 

Jacques CHARPENTIER, compositeur

charpentierPianiste, organiste et compositeur, Jacques Charpentier a été nommé en 1966 Inspecteur principal de la musique par André Malraux, alors Ministre de la Culture. Il accède aux fonctions d’Inspecteur général de la musique au Secrétariat d’Etat à la Culture en 1975. Entre 1979 et 1981, il est Directeur de la musique, de l’art lyrique et de la danse au Ministère de la Culture et de la Communication.

Dans sa jeunesse, Jacques Charpentier effectue un voyage en Inde au cours duquel il s’initie à la musique traditionnelle de ce pays. Ayant étudié la composition avec Tony Aubin et la philosophie de la musique avec Olivier Messiaen, il se lance dans la composition des 72 études karnatiques pour le piano, fortement imprégnées de culture musicale hindoue.

Jacques Charpentier est également le compositeur de l’opéra Béatrice de Planisolles, sur un livret de René Nelli. L’œuvre a été créée en 1971, au festival d’Aix-en-Provence.

 

François-Michel RIGNOL, pianiste

rignol

Prix d’excellence et diplômé de l’Ecole normale supérieure de musique (ENSM) de Paris, François-Michel Rignol partage sa vie entre l’enseignement du piano au Conservatoire à rayonnement régional de Perpignan et sa carrière de concertiste.

Passionné par Déodat de Séverac et les musiciens du XX° siècle, il se consacre aussi aux musiques d’aujourd’hui et interprète les oeuvres de nombreux compositeurs contemporains.

 

 

Le concert débutera à 15 heures par une rencontre avec Jacques Charpentier au cours de laquelle le compositeur expliquera au public la genèse de ses Etudes Karnatiques. 

A l'issue de l'après-midi, le député-maire de Carcassonne Jean-Claude Pérez remettra la médaille d'honneur de la ville de Carcassonne à Jacques Charpentier. 

Cet hommage est organisé avec le précieux concours de la Ville de Carcassonne et de Carcassonne Agglo. 

12 décembre 2011

En compagnie des Editions de Rivières

rivieresLe Centre Joë Bousquet présente du 16 décembre au 17 mars 2012 dans les salles d'exposition du premier étage de la Maison Bousquet (53 rue de Verdun à Carcassonne) une exposition consacrée à l'aventure singulière des Editions de Rivières, dans le sillage de Pierre-André Benoit.

Les éditions de Rivières ont été créées par Jean-Paul Martin, cousin de Pierre-André Benoit, qui comme son illustre aîné, rassemble peintres et poètes pour réaliser des livres d'artistes tirés à un petit nombre d'exemplaires. A ce jour, les éditions de Rivières ont mis en circulation plus d'un millier de titres ! 

C'est cette expérience unique dans le monde de l'édition artistique que le Centre Joë Bousquet vous invite à partager. Le vernissage a lieu vendredi 16 décembre à 18 h.

En attendant, quelques notes à propos des éditions de Rivières.   

 

Faire un livre, par Pierre-André Benoit


Faire un livre, c’est amonceler des pages et chaque page est un tableau. C’est évident pour celle où il y a une gravure. Cela l’est moins pour une page de texte. C’est pourtant dans sa conception un papier collé. Travail plus complexe pour la couverture. Pour ma part j’ai toujours procédé non en établissant un plan mais en découpant chaque ligne ou bloc et en faisant un collage. Je ne garde pas souvent mes préparations qui sont plus que des compositions, qui pourraient telles quelles se suffire, que ce qui devient page de livre. Dans l’entassement il faut, comme un accrochage de tableaux, que la succession de pages joue entre elles.

rivieres2Un livre, pour ma part, est entrevu avec l’oeil du peintre. Peut-être qu’une peinture est entrevue avec l’œil du typographe. Ce qui fait qu’un livre est plus qu’un livre et une peinture autre chose qu’une peinture. J’ai peint surtout non pour illustrer mais pour faire des pages de livres, d’où de petits formats, et depuis toujours enclin pour une série au même format, et d’en faire, d’un tas à feuilleter, un livre. La peinture n’est-elle pas une sorte d’écriture ? Je dis la même chose aussi bien en écrivant ou en peignant mais selon plus particulièrement d’une façon ou d’une autre, une écriture étant plus adéquate que l’autre pour dire ceci ou cela, comme subsidiairement il y a la prose ou la poésie, le collage, le dessin ou la peinture.

Je n’aurais pas fait des imprimés comme j’en ai fait si je n’étais pas peintre. Je n’aurais pas fait des peintures comme j’en ai faites si je n’avais pas été typographe. L’exigence est la même. Le plus de l’imprimé vient de l’autre désir. La rigueur ailleurs vient de celle du plomb.

L’aérien a une autre source.

@Pierre André Benoit

 

Et quelques mots du poète Gaston Puel

« … PAB, c’est l’histoire d’un artiste-artisan-poète qui a créé de la valeur sans souci de sa valeur d’échange. Bien sûr, avec le temps, sa production a subi les lois inexorables du marché, mais jamais elle n’a été conçue pour un échange commercial. Alors que nous assistons à la fabrication culturelle sur demande d’un marché attisé par le vent des médias, alors que des artistes fonctionnaires appliquent des recettes qui promettent succès et gros tirage, je veux croire que l’histoire de PAB contient un message d’espoir et de dignité. »

Pour en savoir plus : le site officiel des éditions de Rivières

Exposition ouverte du mardi au samedi de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h. Fermé le dimanche, le lundi et les jours fériés.

19 novembre 2011

Rencontres sur la poésie des troubadours et 26 et 27 novembre

troubadoursDans le cadre l'exposition consacrée au typographe Thierry Bouchard, nous vous proposons deux journées de rencontres sur le thème de la poésie des troubadours dont vous découvrirez le programme complet ci-dessous.

ATTENTION : CHANGEMENT DE LIEU

En raison des règles de sécurité, les rencontres ne pourront pas se dérouler comme d'habitude dans les salles d'exposition du premier étage de la Maison Bousquet (53 rue de Verdun). La journée du samedi se déroulera dans la salle Gaston Bonheur (ancienne salle des mariages) au premier étage de l'ancienne mairie, rue Aimé-Ramond. La journée du dimanche aura lieu quant à elle à l'auditorium de l'ancienne chapelle des Jésuites, rue des Etudes. Merci de bien vouloir noter ces changements de lieux. L'entrée reste évidemment, comme toujours, libre et gratuite.

Samedi 26 novembre (salle Gaston Bonheur, ancienne mairie)

de 10h 30 à 13h : 

- Pierre BEC (Romaniste, écrivain de langue d'Oc, spécialiste de littérature et de linguistique occitanes) : Les femmes troubadours

- Miriam CABRE (Institut de Llengua i Cultura catalanes - Universitat de Girona) : Qui sont les troubadours catalans ?

- Gilda CAÏTI RUSSO (Maître de Conférences en Occitan médiéval, Université Paul Valéry, Montpellier) : La poésie des troubadours, résonance dans la littérature italienne

- Didier Marc GARIN (Compositeur-traducteur) : Au sujet de la Comédie de Dante

de 15h à 19h :

- Michelle GALLY (Professeur en langue et littérature médiévales, Université de Provence/CNRS) : Du sud au nord : troubadours et résonances médiévales dans l'espace européen

- Hélène AJI (Professeur de littérature américaine, Université Paris Ouest Nanterre) : Ezra Pound et les Troubadours

- Daniel VIGNE (Professeur de Philosophie en classes préparatoires, et de Théologie à l'institut Catholique de Toulouse ; Président de l'Association des Amis de Lanza del Vasto) : Lanza del Vasto, poète de la lumière

- Domenico CANCIANI (Faculté des Sciences politiques, Padoue) : Prendre feu. Simone Weil et la civilisation d'Oc

- Roland PECOUT (Ecrivain et chercheur en littérature moderne, Montpellier) : Influence de l'écriture des troubadours, communication suivie d'une table-ronde avec Serge BEC (Poète, Apt), Jean-Claude FORET (écrivain, enseignant de langue et littérature occitanes, Université Paul Valéry, Montpellier) et James SACRE (Poète, Montpellier)

 

Dimanche 27 novembre (auditorium de la chapelle des Jésuites)

de 10h 15 à 12h 30 :

- Olivier BARBARANT (Professeur de Khâgne moderne au Lycée Lacanal, écrivain. A dirigé l'édition en Pléiade des œuvres poétiques complètes d'Aragon, Paris) : Aragon et sa (re) lecture des troubadours

roubaud

 

 

- Jacques ROUBAUD (Poète) : Le rôle des troubadours à l'invention du sonnet

 

 

 

à 16h : poésie et musique

Lectures des troubadours par Guy VASSAL, Roland PECOUT et Gisèle PIERRA et Céline MISTRAL         (Troubadours Art Ensemble).

18 novembre 2011

Disparition de Pierre Dumayet

Pierre Dumayet nous a quittés. Il s'est éteint jeudi matin à son domicile parisien. Ses obsèques auront lieu à Bages (Aude) mardi 22 novembre après-midi. Pierre Dumayet était un ami du Centre Joë Bousquet. Il comptait beaucoup pour nous tous. Nos pensées se tournent vers Françoise, son épouse et Antoine, son fils. 

Quelques mots, en hommage

dumayetHomme de télévision, écrivain, auteur de documentaires consacrés pour la plupart à des peintres et écrivains, Pierre Dumayet s'est éteint hier à l'âge de 88 ans à son domicile parisien.

Il avait été, aux côtés de Pierre Sabbagh et Pierre Desgraupes, le pionnier de l'information télévisée avec la présentation des actualités, ancêtres du journal télévisé et bien sûr l'émission « Cinq colonnes à la Une » qu'il co-dirigeait avec Igor Barrère, un grand classique du petit écran. Défenseur convaincu de la liberté d'expression et de l'indépendance de l'information, il avait fait les frais de son engagement en 1968 - on ne pardonnait déjà pas facilement aux hommes de conviction - mais n'avait pas moins poursuivi une trajectoire personnelle originale.

Homme de culture, Pierre Dumayet était un amoureux de l'art et des lettres. Les plus anciens d'entre nous se souviennent de « Lectures pour tous », cette émission littéraire qui fut en quelque sorte l'ancêtre d'Apostrophes. Sur le plateau, Pierre Dumayet reçut quelques pointures de la littérature de son temps : Marguerite Duras par exemple, et le toujours très controversé Louis-Ferdinand Céline dont l'entretien fut, lui aussi, un moment exceptionnel de télévision.

Outre ces activités, Pierre Dumayet a aussi écrit de nombreux films pour la télévision, sur des artistes qu'il aimait. Citons son ami le peintre Pierre Alechinsky dont il dévoila l'atelier au grand public, le poète Pierre Reverdy (né à Narbonne) dont le film co-signé avec le réalisateur Robert Bober a encore été projeté la semaine dernière lors du Banquet du Livre d'automne à Lagrasse, et enfin les écrivains Marcel Proust et Gustave Flaubert. Tous ces documentaires avaient été diffusés dans le cadre de l'émission de Bernard Rapp, « un siècle d'écrivains ».

bagesEt puis tout près de nous, plus près en tout cas que de Paris où il vécut une immense carrière de journaliste et d'homme de télévision, Pierre Dumayet avait épousé l'Aude. Avec Françoise, son épouse artiste peintre, ils avaient acquis une maison à Bages, dominant l'étang éponyme qu'il contemplait toujours avec bonheur pendant les longs mois de printemps et d'été où il s'installait « à la campagne », comme il disait. « La mer qui est loin derrière la mer que je vois ne doit pas être belle à voir. Si j'étais un bateau, je pourrais décrire la tempête, mais je suis assis à ma table et je n'ai peur de rien... » (1) Ainsi décrivait-il ce qu'il voyait de sa fenêtre, à Bages où il goûtait à la sérénité des paysages et où, à ses heures, il était lecteur de L'Indépendant qu'il épluchait avec une tendresse particulière pour les chroniques des villages dont il restituait la saveur lors de lectures partagées.

Pierre Dumayet avait tissé des liens forts avec la région. A Perpignan, il comptait quelques amis fidèles parmi lesquels la galeriste Thérèse Roussel qui avait consacré dernièrement une exposition aux travaux de son épouse Françoise. Dans l'Aude, il était devenu un proche du Centre Joë Bousquet pour lequel il donna de son temps en se révélant un soutien sûr dans l'organisation de bon nombre d'expositions et de rencontres consacrées à la littérature et aux arts plastiques.

Enfin, il était le compagnon de route du Banquet du Livre de Lagrasse et des éditions Verdier où il a publié pas moins de cinq romans. Car Pierre Dumayet, qui avait tant fréquenté les auteurs et les livres, était aussi un authentique écrivain, pas un écrivain « à temps perdu » mais l'homme d'une langue lumineuse par son élégance et pétillante d'intelligence. Une langue accueillante et radieuse.

Pierre Dumayet était un écrivain du soleil, de la sieste railleuse et de l'apéritif rieur : sa vie à Bages était un village, pour paraphraser le titre d'un de ses livres, et sa disparition laisse ses amis audois et catalans dans la peine, eux qui le voyaient comme un roc indestructible.

Alors puisqu'il parlait si bien, si juste, laissons à Pierre Dumayet le mot de la fin avec cette évocation nonchalante de la mort incongrue : « Dans une centaine d'années, je ne me souviendrai plus de la couleur de ma voiture. J'aurai perdu ma mémoire en même temps que le reste. Mon nom ne sera plus le mien. A ma place il n'y aura personne... ».

(1) Les citations sont extraites de « Brossard et moi » et « La nonchalance », romans publiés aux éditions Verdier. Pierre Dumayet est également l'auteur de « La maison vide », « Le parloir », « La vie est un village » (Verdier) et « Autobiographie d'un lecteur » (Pauvert et Le Livre de Poche). 

Serge Bonnery

(Ce texte est paru dans les éditions de L'Indépendant du vendredi 18 novembre).

Ailleurs, sur le toile : 

Dans Libération : son portrait et un entretien avec Jean-Baptiste Harang lors d'une rencontre à Carcassonne.

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Le centre Joë Bousquet
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